19 pistes pour accompagner les colères des enfants avec bienveillance
Les crises sont générées par des besoins qui ne sont pas comblés (fatigue, faim, besoin de contact, de pouvoir sur la situation…).
Le fait de se dire que la crise est une réaction face à une situation donnée est plus aidant que le fait de se dire que l’enfant est capricieux.
Par ailleurs, la colère n’est pas une émotion à éviter ou étouffer à tout prix. Elle a une fonction réparatrice qui permet de se remettre d’une frustration ou d’une attaque de l’intégrité. Il convient donc de la reconnaître comme une émotion vitale et légitime, sans pour autant accepter les comportements à problème (taper, insulter, casser des choses…).
1. L’enfant apprend par imitation
Nous pouvons offrir un modèle à nos enfants. Cela passe par le fait de reconnaître notre propre colère sans culpabiliser ou accuser l’enfant d’être la cause de cette colère : on vise ici l’expression responsable de la colère. Il est normal de ressentir de la colère et il n’y a pas à en avoir honte. De même, on pourra exprimer notre joie ou notre tristesse quand le contexte s’y prête.
Par ailleurs, on peut montrer à l’enfant ce qu’on fait quand on est frustré ou en colère. Vous pouvez le faire sous forme de récit (ou encore mieux en situation) :
« J’étais en colère parce que…. J’ai dit « grrr » dans ma tête, j’ai pris trois grandes respirations pour me calmer, je me suis isolé(e), j’ai réfléchi à une solution à mon problème et j’ai décidé de… »
2. Aider l’enfant à développer son vocabulaire des émotions
On pourra varier les mots utilisés pour décrire notre état émotionnel et celui des autres. On pourrait même faire une liste avec les enfants pour décrire les différents degrés de la colère du moins fort au plus fort : pas content, mécontent, contrarié, dérangé, ennuyé, irrité, fâché… On encouragera les enfants à utiliser ces mots pour nommer ce qu’ils ressentent.
3. Lire des livres qui parlent de la colère
Il est constructif de lire des contes avec les enfants qui abordent le thème de la colère et d’en discuter avec lui. On pourra faire remarquer la couleur du visage, les poings fermés ou toute autre réaction physique des personnages ainsi que les mots utilisés pour exprimer la notion de colère.
On pourra en profiter pour poser des questions aux enfants sur les situations qui ont déclenché la colère du héros, sur les conséquences de ses actes et sur la façon dont il a affronté ses problèmes.
4. Remarquer les manifestations physiques des émotions
On pourra aider l’enfant à remarquer comment son corps réagit à la colère en décrivant les réactions et en les associant à l’émotion :
« Tu cries, tu as l’air en colère », « Ton visage est rouge, tu es fâché », « Tu fronces les sourcils, j’ai l’impression que tu vas t’énerver », « Tu es en colère, tu sens la boule dans ton ventre et dans ta gorge/ ta respiration s’accélérer ? »
5. Préparer l’enfant à l’éventualité d’une déception
En prévenant l’enfant d’une éventuelle déception ou frustration, on l’aidera à affronter sa colère.
Par exemple : « Il est possible que ton copain/ ta copine ne puisse pas répondre à ton invitation. Peut-être que tu seras déçu(e). Qu’est-ce qu’on pourrait faire alors ? »
6. Enseigner une technique de gestions des émotions : « la technique de la tortue »
Sylvie Bourcier propose dans son livre la technique de la tortue pour apprendre aux enfants à réagir sans explosion à la colère. Cette technique peut être appliquée avec des enfants dès 3 ans 1/2.
Il s’agit d’inviter l’enfant à imaginer qu’il est une tortue qui se retire dans sa carapace. Il place ses bras le long de son corps, il baisse la tête et ferme les yeux.
Situations au cours desquelles utiliser la technique de la tortue :
– L’enfant ressent de la colère envers un camarade et pense qu’il pourrait se montrer violent,
– L’enfant ressent de la colère envers lui-même et anticipe une crise explosive,
– L’adulte invite l’enfant à faire la tortue en disant juste « tortue »,
– Un enfant dit « tortue » à un autre enfant avant qu’une dispute éclate entre eux.
9 étapes à enseigner aux enfants :
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1. Reconnaître que je suis fâchée : « Oui, c’est vrai que je ressens de la colère, j’ai les mâchoires serrées, la tête qui bouillonne, les poings serrés »
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2. Penser « Ma colère est là et c’est une visiteuse de passage »
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3. Aller me retirer dans ma carapace
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4. Prendre de grandes respirations (gonfler le ventre, souffler comme pour faire des bulles de savon) : « Je me détends afin d’affronter les frustrations et je respire avec des grandes inspirations et expirations. Je deviens mou/molle. » Il est amusant de proposer aux enfants de pratiquer cette décontraction en s’imaginant comme une poupée de chiffon qui s’effondre ou un spaghetti qui devient mou en cuisant.
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5. Penser au calme et réfléchir à la situation précise : « C’était un accident », « Mon copain n’a pas fait exprès », « Il m’a dit ça parce qu’il est triste en ce moment », « Je suis capable de trouver une solution »
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6. Sortir de la carapace quand je me sens calme
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7. Penser à des solutions
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8. Choisir une solution qui me convient
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9. Appliquer la solution et me féliciter du résultat
7. Aménager le quotidien
Les enfants ont besoin d’avoir un peu de contrôle sur la situation. Les enfants sont souvent frustrés car ils se retrouvent la plupart du temps dans une position de contrainte. Leur redonner du pouvoir personnel peut passer par la possibilité pour eux de prendre des décisions, de faire de choix (« tu préfères mettre ton maillot vert ou ta chemise bleue aujourd’hui ? », « on prend le chemin de la mairie ou celui de la Poste pour rentrer ? »).
8. Reconnaître l’émotion qui a suscité la crise
On peut accepter et reconnaître l’émotion puis la nommer à l’enfant pour qu’il apprenne à mettre les bons mots sur ses émotions.
« C’est difficile de… »
« Tu es fâché parce que… »
« Tu as le droit d’être fâché, mais je ne peux accepter que tu… »
« Tu peux t’exprimer avec tes mots/ tu sais le dire avec des mots alors fais le »
Il est préférable d’éviter de banaliser (« ce n’est rien… ») ou de disqualifier (« tu te fâches pour rien… ») la colère (et toute autre émotion). C’est par la reconnaissance et l’acceptation de nos émotions et celles des autres qu’on apprend l’empathie.
Par ailleurs, les émotions sont des signaux d’alarme (la colère pour les frustrations, la peur pour les dangers, la tristesse pour les pertes et insatisfactions, la jalousie pour les écarts entre nous et les autres…). Elles ont donc un rôle et ne sont pas à évacuer de nos vies.
9. Faire parler ou dessiner l’enfant
On peut poser des questions à l’enfant avec un dessin comme support : « tu es en colère comment ? » , « tu es en colère comme ça ou comme ça ? »
Quand l’enfant apprend à s’exprimer par des mots ou des dessins, il peut dire qu’il est en colère sans passer par des crises de rage ou de violence. Le parent peut alors « accuser réception » : « Ok, j’ai entendu que tu n’es pas content(e) ».
10. Tous les sentiments sont acceptables, c'est la façon dont on les exprime qui ne l'ai pas toujours
L’enfant a le droit de se mettre en colère. Plus l’enfant essaie de se contrôler, plus il encaisse et il finit par exploser. Or les parents ne voient pas forcément tous les moments où l’enfant a fait des efforts pour se contrôler : ils ne voient que les crises d’explosion si violentes qu’ils en viennent à se demander si l’enfant est normal.
Il est possible de dire à l’enfant « je vois que quelque chose ne va pas » pour désamorcer une crise et engager la discussion (sans forcer l’enfant; parfois la simple reconnaissance de son vécu suffira).
11. Ecouter et s’intéresser à ce que vit l’enfant dans le moment présent
L’écoute active consiste à reformuler les mots de l’enfant sans les dénaturer, à exprimer les sentiments de l’enfant sans apporter de réponse à ses problèmes et à acquiescer avec des « ah », des « hum », des « oh », des « je vois ».
Pour apprendre à pratiquer l’écoute active, le livre Parents efficaces de Thomas Gordon me semble le plus abordable (à la fois en termes de contenu et de prix).
12. Une question à poser aux enfants pour les familiariser avec l’empathie
A ton avis, comment je me sens ? Quel est le problème pour moi ? Pour engager la discussion et inciter l’enfant à réfléchir.
13. La boîte à cris
Tous les membres de la famille peuvent exprimer leur mécontentement dans la boîte en criant dedans à travers le trou. Une fois la boîte remplie, on va dehors pour jeter les cris.
14. Les câlins
Comme nous l’explique Catherine Gueguen, les câlins provoquent la sécrétion des molécules suivantes : l’ocytocine, la dopamine, des endorphines, la serotonine. Ce cocktail contribue à notre bien-être et alimente un cercle vertueux qui mène :
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à une diminution du stress
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au développement de l’empathie
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à une augmentation de la confiance
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au renforcement de l’attachement
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à la croissance de l’affection réciproque
Mieux ! Les câlins et autres contacts affectueux développent le cerveau des enfants et font notamment maturer le cortex préfrontal, zone essentielle du cerveau.
15. Les lettres de colère
Les plus grands peuvent écrire des lettres avec leurs propres mots pour soulager leur colère. La lettre n’a pas pour objectif d’être donnée mais simplement de mettre des mots sur les émotions.
Il est possible de créer des cartes avec les émotions et les sentiments les plus courants, illustrées par un dessin ou une photo de l’enfant qui imite cette émotion.
Voici quelques émotions et sentiments liés à des besoins satisfaits : étonné, plein d’énergie, content, joyeux, inspiré, optimiste, soulagé, surpris, touché, à l’aise, plein d’entrain, comblé, ému, fier, confiant, reconnaissant…
Voici quelques émotions et sentiments liés à des besoins non satisfaits : fâché, désorienté, déçu, frustré, irrité, nerveux, perplexe, triste, ennuyé, préoccupé, découragé, embarrassé, impuissant, impatient, seul, mal à l’aise…
Le tableau des choix est un outil visuel qui présente de façon ludique différentes solutions pour gérer un problème ou accompagner une émotion forte.
18. L’espace de retour au calme
L’idée est de proposer aux enfants un espace de retour au calme plutôt qu’un isolement au coin.
Petit jeu à faire avec son enfant dans le cadre d’une activité ludique. En effet, les réflexes mentaux s’acquièrent au calme, lorsque le stress est au plus bas et que l’inconscient peut s’imprégner correctement.
Téléchargez le C à colorier ici, puis expliquez à votre enfant le déroulement du jeu :
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Lorsque tu sens la colère monter, attire mon attention en traçant un « C » en l’air avec ton index. Ce sera notre signe secret pour indiquer que tu as besoin de mon aide.
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A ce moment-là, je sortirai de mon sac un crayon de couleur et la feuille du colèrimètre. Je te proposerai de colorier le « C » géant jusqu’à la hauteur qui correspond à l’intensité de ton émotion. Ainsi, si tu te sens un peu en colère, tu colorieras le bas du « C » jusqu’à 1,2 ou 3. Ce n’est pas grave si tu dépasses.
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Il se peut que ce coloriage te fasse te sentir mieux. Mais si ce n’est pas le cas, le jeu continue. Tu vas pouvoir choisir ta solution pour transformer la colère en calme. D’ailleurs, ces deux mots commencent pas la même lettre !
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Choisis une des solutions qui te convient dans la liste ci-dessous pour te sentir mieux.
Description des solutions : (les solutions constituent des activités à part entière à pratiquer)
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« Je dis comment je me sens … » : Apprenez à l’enfant à verbaliser ses émotions au cours de la journée. Aidez-le en lui demandant régulièrement ce qu’il ressent. La verbalisation atténue l’intensité d’une émotion.
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« Je ferme les yeux » : Le fait de fermer les yeux coupera l’enfant de stimuli visuels. Ceci peut donc lui permettre de se reconnecter avec ses autres sens dans le moment présent. Vous pouvez coupler cette solution avec d’autres choix : penser à un mot qui calme, à la couleur qui apaise,…
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« Je respire profondément » : La respiration chasse le stress. Amusez-vous à prendre de longues inspirations avec votre enfant et montrez-lui comment son ventre se gonfle et se dégonfle. Un décompte mental jusqu’à 10 est également efficace pour rythmer la respiration.
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« Je passe mes mains sous l’eau tiède » : Cette astuce fait baisser le stress et procure un sentiment de bien-être.
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« Je demande un câlin » : Le contact physique déclenche la sécrétion d’ocytocine, de dopamine, d'endorphines et de serotonine. Ce cocktail contribue à notre bien-être.
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« Je bois un verre d’eau » : Simple et efficace, en plus de répondre à la soif (la déshydratation est une source de stress), ce geste apaise. Lors des tests au calme, insistez sur la limpidité de l’eau et les bienfaits sur notre corps.
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« Je demande un massage » : Nous retrouvons, via le massage, les bienfaits du contact physique. De plus c’est un moment de complicité. Vous pouvez masser les mains ou encore la nuque.
Bienfaits de cette méthode :
Le signe (le tracé du « C » dans l’air) mis en place entre l’enfant et ses parents est « secret ». Cette caractéristique symbolise de la confiance et de la connivence pour les enfants. De quoi réveiller un sentiment de sécurité. De plus, l’enfant est déjà actif face à sa colère lorsqu’il trace la lettre dans les airs : il fait appel à son imagination et contrôle ses mouvements.
La partie colèrimètre est une forme d’art thérapie puisqu’il s’agira de colorier la lettre « C ». Cette activité a des vertus apaisantes et permet de réguler l’amygdale grâce aux fonctions supérieures du cerveau. Le fait de se demander quelle est l’intensité de l’émotion est également une astuce pour diminuer l’affect. En effet, l’enfant raisonne et jauge son ressenti au lieu de céder à la tempête émotionnelle.
La dernière étape est le choix de l’activité libératrice. Il est nécessaire de préparer ses solutions en s’entrainant avec l’enfant afin qu’il en maîtrise tous les aspects et en profite un maximum.